Le statut d’hébergeur : comment distinguer le faux du vrai ?

publié le 1 septembre 2015

Le principe de la refonte de la directive de 2001 sur le droit d’auteur dans la société de l’information semble acquis. Il n’est pas certain que ce soit une bonne idée. C’est peut-être néanmoins l’occasion de réexaminer quelques principes qui handicapent le droit d’auteur en Europe.

La situation est en effet un peu paradoxale parce qu’une autre directive, celle de 2000 sur le commerce électronique, apparaît, elle, intouchable alors qu’elle traite aussi de la protection du droit d’auteur. Le motif officiel de cette sanctuarisation est le caractère transversal du texte de 2000, qui concerne tous les secteurs. Le texte de 2000 a pourtant un impact considérable sur la propriété intellectuelle puisqu’il a introduit un régime de large « irresponsabilité » juridique pour les intermédiaires techniques, notamment fournisseurs d’accès (FAI) et hébergeurs. C’est en partie en raison du statut des intermédiaires que la politique de lutte contre la contrefaçon sur internet manque d’efficacité et que l’usage des œuvres protégées sur les réseaux ne génère pour les créateurs que des droits insuffisants par rapport à la masse des œuvres mises à disposition.

Rôle purement technique
A cet égard, l’application du statut des hébergeurs à des activités pour lesquelles il n’a été ni conçu, ni pensé, laisse perplexe. Dans la directive de 2000, un hébergeur est une personne qui assure le stockage d’un contenu pour le compte d’un tiers afin que celui-ci puisse le mettre à la disposition du public. L’hébergeur a donc un rôle purement technique ; il n’est pas connu du public et n’apparaît pas en tant que tel auprès de lui. Il n’est pas non plus, en principe, associé au succès du site dont il assure le stockage.
Pourtant la jurisprudence applique le statut d’hébergeur à des activités qui vont bien au-delà d’une simple intermédiation technique. C’est le cas pour les sites communautaires. Ces sites ont pour fonction de permettre la mise à disposition du public des contenus et des œuvres postées par les internautes et consultables par toute personne qui le souhaite. Selon les juridictions, les sites communautaires se contentent d’assurer l’hébergement des contenus et des œuvres ; leur prestation est technique et seuls les internautes sont responsables des actes couverts par le droit d’auteur et, potentiellement, tenus de demander une autorisation lorsqu’il y a lieu (ce qui est évidemment en pratique impossible).

Activité de diffusion
En réalité les sites communautaires ne se bornent pas à une prestation purement technique. Personne ne consulte un site en raison de l’identité de son hébergeur. Au contraire le trafic sur un site communautaire est directement fonction de l’attractivité de sa marque qui, en retour, génère un nouveau trafic, induit des mises à dispositions de plus en plus nombreuses et finit par constituer une activité de diffusion à part entière, comparable à celle d’un diffuseur classique, comme une chaîne de télévision, et partiellement substituable à elle.
La refonte de la directive sur le droit d’auteur devrait donc permettre  d’établir une distinction claire entre ce qui relève du véritable hébergement – et donc de la seule directive de 2000 – et ce qui relève d’une activité de mise à disposition des œuvres sur un site accessible au public dont l’audience et la valeur sont directement fonction de ce que le public peut y trouver.
Ce serait un minimum pour que, conformément à son objectif d’origine, la directive de 2001 accorde un « haut niveau de protection » du droit d’auteur ainsi que le proclament ses considérants.

Hubert Tilliet

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